Les expériences vécues par le jeune enfant vont grandement influencer son développement. Elles sont largement conditionnées par les environnements dans lequel il évolue et les interactions et activités qui lui sont proposées par les adultes autour de lui. Avant de retrouver du commun à l’école maternelle, les enfants connaîtrons une grande diversité de parcours. Avec quelles conséquences sur leur développement ?
Durant les années qui vont de la naissance jusqu’à l’entrée à l’école maternelle, les enfants sont exposés à des environnements très divers. Certains accèdent très tôt à un accueil collectif et passent l’essentiel de leur temps sous la responsabilité de professionnelles de la petite enfance. D’autres auront vécu principalement dans le foyer familial. L’attention dont ils auront pu bénéficier de la part des adultes aura également été très variable. Cette diversité permet-elle à chaque enfant de bénéficier d’un environnement propice à son développement ? Quelques éléments de réponse.
Diversité des environnements des jeunes enfants de 0 à 3 ans
L’environnement des jeunes enfants au quotidien
Si la diversité caractérise largement l’accueil des jeunes enfants, on peut néanmoins dresser une typologie des types de lieux qui constituent leur environnement quotidien :
- Le domicile familial ou d’une autre personne (membre de la famille, ami, voisin) ;
- Un établissement d’accueil du jeune enfant (crèche, halte-garderie, jardin d’enfant) ;
- Au domicile d’un professionnel (assistante maternelle) ;
- A l’école ou dans un accueil périscolaire ;
- A l’extérieur.
Ces lieux ne sont pas mutuellement exclusifs. La plupart des enfants en fréquentent plusieurs au cours de la semaine. Dans ces différents espaces, l’enfant peut être confié à différents adultes : parents, membres de la famille, professionnels, garde à domicile.
Un tiers des enfants de moins de trois ans sont exclusivement gardés par leurs parents
La Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (DREES) a mené une grande enquête en 2021 afin d’identifier les habitudes d’accueil des enfants de moins de trois ans en semaine, sur les heures de travail (de 8h à 19h). Il en ressort que si l’accueil hors de la famille s’est largement développé, la plupart des enfants (56%) sont gardés la majorité du temps par leur parents au domicile familial. Cependant, seuls 34% d’entre eux passent réellement toute la semaine au domicile des parents. Environ la moitié des enfants de moins de trois ans connaissent un mode hybride[1].
Des enfants de moins de 3 ans à l’école ?
La scolarisation à l’âge de deux ans est possible en France. Elle était même relativement fréquente par le passé pour les enfants nés dans les premiers mois de l’année civile suivant la scolarisation. Si bien qu’à la rentrée 1999, 35% des enfants de moins de trois ans étaient scolarisés contre 9,8% à la rentrée 2021 (Source : FSU-SNUIpp).
Elle peut se faire dans le cadre d’une classe de « toute petite section » qui offre des conditions d’accueil spécifiques, souvent en complément d’un autre mode. Il est également possible d’intégrer ces très jeunes enfants dans des classes multi-niveaux.
Par ailleurs, des dispositifs « passerelle » ont été mis en œuvre pour rapprocher les pratiques entre établissements d’accueil du jeune enfant et école maternelle. Ces classes où collaborent professionnelles de la petite enfance, enseignants du premier degré et attachés territoriaux spécialisés des écoles maternelles (ATSEM) ne se sont cependant pas beaucoup développées. Selon la Direction générale de l’enseignement scolaire (DGESCO), on en dénombrait moins de 100 en 2017.
Qu’est-ce qui constitue un environnement de qualité ?
Les interactions humaines au premier plan
Au sein de l’environnement du jeune enfant, la présence d’adultes qui répondent à ses besoins et lui portent de l’attention constitue un élément déterminant dans l’optique de son développement. À ce titre, le comportement des parents et la qualité des soins qu’ils prodiguent à l’enfant forment le premier pilier d’un environnement de qualité. Par la suite, la qualité des interactions avec les autres adultes, en particulier les professionnelles chargées de son accueil, contribuent également à assouvir son besoin de sécurité et son équilibre émotionnel.
Plusieurs études insistent sur le lien entre le comportement parental – en particulier l’attention portée aux demandes des enfants, la chaleur dans les interactions, le soutien manifesté – et certaines capacités cognitives et émotionnelles développées par les enfants. C’est d’autant plus vrai en ce qui concerne la capacité du très jeune enfant à réguler son état émotionnel et à s’engager dans les activités favorables à son développement[2].
Du côté des professionnelles, les études récentes ont pu établir les postures les plus favorables au développement de l’enfant. On retrouve l’importance de comportements sensibles et chaleureux, d’une écoute attentive, de la prise en compte des besoins de l’enfant. Pouvoir investir émotionnellement la relation avec un nombre restreint d’adultes contribue à la sécurisation de l’enfant ce qui plaide pour une figure de référence y compris au sein des structures d’accueil collectif[3].
Pour la suite de son parcours éducatif, cette base joue un rôle certain. La solidité des relations durant les premières années de vie réduit l’anxiété, favorise les émotions positives et contribue à la qualité des liens futurs, notamment avec les enseignants et les autres enfants[4].
Le lieu idéal ? Hospitalier et propice aux expériences
Le jeune enfant, au fur et à mesure de son développement, va chercher dans son environnement immédiat les supports aux expériences qui lui permettront de satisfaire son besoin d’exploration du monde tout en assurant sa sécurité physique et affective.
Un lieu propice doit donc, dans l’idéal, présenter certaines caractéristiques dont la recherche a tâché de dresser une typologie (infographie p. 24)[5]. A ce titre, les lieux conçus spécifiquement à cet usage – les établissement d’accueil du jeune enfant (EAJE) tels les crèches, halte-garderies ou jardins d’enfants – présentent l’avantage de pouvoir être entièrement adaptés. Les autres lieux où sont régulièrement accueillis les jeunes enfants – domicile des parents ou d’une assistante maternelle par exemple – peuvent également se révéler propices à condition d’un certain nombre d’ajustements.
Un lieu unique ne présente pas l’ensemble des caractéristiques et le jeune enfant devra en fréquenter plusieurs. Par exemple, l’accès à des environnements extérieurs pourra nécessiter de sortir dans un parc ou une aire de jeux.
Des environnements plus favorables ?
Face à la diversité des situations d’accueil et compte tenu des enjeux de développement, tous les lieux d’accueil se valent-ils ? Des recherches récentes ont pu apporter quelques éléments de réponse.
L’accueil collectif tel qu’il est proposé en EAJE se révèlerait plutôt bénéfique sur certains aspects. Il faciliterait le développement du langage, en particulier chez les enfants dont l’environnement familial est moins favorable sur le plan socio-économique. Ainsi, un enfant de 2 ans ayant fréquenté une crèche au moins un an maîtrise plus de mots que celui qui ne l’a pas fréquentée. Mais cet effet est plus marqué chez les enfants dont la mère a un niveau d’éducation inférieur au baccalauréat (+10 mots contre +5 chez ceux dont la mère a au moins le baccalauréat)[6].
L’accueil collectif amoindrirait également le risque de rencontrer par la suite des difficultés émotionnelles ou relationnelles[7]. Le développement moteur des enfants semble également favorisé par la fréquentation d’une crèche.
Pour autant, au niveau du comportement, la fréquentation d’un accueil collectif semble moins favorable. A ce titre, il semble désormais avéré qu’un accueil prématuré hors de la famille – avant un an – nuit à la qualité de la relation entre l’enfant et ses parents et contribue à altérer son comportement.
Ces recherches permettent d’affiner nos intuitions quant à l’environnement le plus propice au jeune enfant. Avant un an, un accueil principalement familial semble préférable.
Par la suite, le recours à des temps collectifs présenterait un intérêt certain, en particulier pour les enfants dont l’environnement socio-économique est moins favorable. cependant, un tel schéma-type demeure largement dépendant de la qualité de l’accueil proposé, en particulier sur le plan de la sécurité affective et relationnelle offert à l’enfant.
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