L’école est un espace où se retrouvent filles et garçons. Alors que les premières réussissent mieux scolairement, les seconds se disent plus optimistes par rapport à leur futur. La mixité au sein des établissements doit-elle être repensée pour favoriser l’égalité filles/garçons ? Décryptage avec Bérengère Wallaert, chargée d’études pour le think tank VersLeHaut.
C’est une réalité : les filles réussissent mieux à l’école. Et le décrochage scolaire est un phénomène qui touche davantage les garçons. Si l’on regarde les résultats au bac, en 2017, elles ont été 84 % à l’obtenir en France, contre 74 % des garçons. Elles sont aussi plus nombreuses dans les filières générales que les garçons[1]. Et lorsqu’existaient encore les trois filières – Scientifique, Economique et Sociale, Littéraire – au lycée général, contrairement aux idées reçues, la filière la plus choisie par les filles était la filière S. Oui, les filles préfèrent les sciences. En revanche, les garçons désertaient massivement la série littéraire[2].
Les filles ont-elles la bosse des maths?
Profitons-en pour contrer une autre idée reçue : même si elles ont de moins bons résultats dans beaucoup d’évaluations internationales, les filles ont de très bonnes dispositions pour les mathématiques. Une étude l’a démontré[3] : si elles effectuent un test en pensant faire du dessin, elles réussissent mieux que les garçons ! Mais si elles réalisent ce même test en pensant faire un exercice de géométrie, c’est l’inverse. On leur a tellement dit que « les maths c’est pour les garçons »…
Dans tous les cas, les filles ont de meilleurs résultats scolaires sur toute la durée de leurs études. Est-ce à dire que l’école est une affaire de filles ? En fait, elles semblent mieux adaptées au système, qui est souvent « très féminin ». Les enseignant(e)s sont pour une écrasante majorité des femmes. L’école mobilise des compétences qu’on trouve davantage chez les filles : le langage et la lecture. Souvent, les filles verbalisent plus facilement et plus jeunes. Et elles sont plus enclines à la lecture : 76% d’entre elles lisent au moins une fois par semaine, pour 60% des garçons.
Pourtant les filles se sentent moins à l’aise à l’école
Pourtant, il y a des domaines dans lesquels la place des filles à l’école est plus problématique. Les filles témoignent davantage d’un sentiment d’insécurité (74 % d’entre elles estiment qu’elles sont en sécurité autour du lycée contre 81 % des garçons[4]) et elles sont moins optimistes pour leur avenir : une jeune fille sur trois est pessimiste, contre 1 garçon sur 4[5].
La cour pour les garçons?
La cour de récréation reflète aussi la difficulté de l’école à donner une juste place aux filles : l’espace principal est souvent réservé aux jeux de ballons pratiqués par les garçons, dont les filles même motivées peuvent être exclues. Tandis que les filles se partagent l’espace restant, leurs besoins d’activité physique ne sont pas pris en considération. Certaines écoles, conscientes de l’inégalité, ont fait voter les élèves pour choisir de quelle façon occuper la cour. On a vu des roulements se décider : une récréation pour le foot, une autre pour les jeux de cordes et d’élastiques, la troisième pour jouer à chat…
Pour une vraie égalité, il faut penser la mixité
On le voit, pour favoriser l’égalité filles/garçons, il ne suffit pas de mettre tout le monde ensemble de façon indifférenciée. Il faut penser la mixité pour qu’elle permette à chacun de déployer ses talents et de s’enrichir des apports de l’autre. D’ailleurs, une étude montre que s’agissant de la lecture, les garçons profitent de la présence des filles[6]. Plus elles sont nombreuses dans l’école, plus les résultats des garçons en lecture sont élevés ! En revanche, les filles entre elles sont encore meilleures…
[1] l’écart est de 13 points
[2] 4% la choisissent, pour 14% des filles
[3] Isabelle Régner et Pascal Huguet, chercheurs au CNRS, ont mesuré les effets négatifs des stéréotypes de genre sur les performances des filles dans les disciplines scientifiques.
[4] Résultats de l’enquête de climat scolaire et victimation auprès des lycéens pour l’année scolaire 2017-2018, ministère de l’Education nationale
[5] Baromètre Jeunesse&Confiance, OpinionWay, VersLeHaut 2020, avec le soutien de Total Foundation
[6] Etude de M. Van Hek, G. Kraaykamp et B. Pelzer basée sur les résultats de l’enquête PISA 2008