Choisir son parcours de formation, quel défi pour les jeunes ! Comment discerner ce que l’on veut faire, ce que l’on aime faire, ce que l’on sait faire ? Comment se repérer dans la « jungle » des formations, des débouchés, des métiers, des possibilités ? Comment savoir là où il y a des places aujourd’hui et demain, des besoins, des opportunités ? C’est d’autant plus difficile que les paramètres changent en permanence et de plus en plus vite : transformation des métiers avec l’impact du numérique et de la mondialisation, réformes du collège, du lycée, du bac, de l’accès à l’enseignement supérieur…
Cette question de l’orientation est plutôt mal traitée dans les parcours éducatifs alors même qu’elle renvoie à des enjeux essentiels :
- au niveau personnel : à travers les choix de formation se joue des choix de vie. Nos parcours de vie se construisent en partie en fonction des formations que nous suivons…
- au niveau politique : dans un système qui pose en fondement la liberté et l’égalité, et qui affirmer promouvoir dans son organisation la mobilité sociale selon le mérite, il est évident que la formation et l’orientation revêtent une dimension particulièrement lourde. C’est particulièrement vrai en France où on a parfois tendance à considérer que l’ascension sociale est surtout liée au diplôme. D’ailleurs, 68% des jeunes et 79% des parents pensent que la réussite scolaire et la réussite professionnelle sont liées.
- au niveau économique et social : le spectre du chômage de masse hante les familles et les jeunes et explique en partie la pression forte qui pèse sur l’école, au moment des choix d’orientation, et donc la tentation de la course au diplôme, indépendamment des aspirations des jeunes et des réalités du marché du travail. Dans le même temps, le monde économique considère qu’il y a une inadéquation entre les formations et les besoins du marché du travail. Ainsi seuls 14% des chefs d’entreprise considèrent que le système éducatif est adapté aux réalités du monde du travail. Alors que le taux de chômage des jeunes s’élève aujourd’hui à 22%, beaucoup de métiers sont en tension, dans l’industrie, les services, la restauration…
Le sujet est sensible : pour beaucoup, l’orientation est subie, plutôt que choisie. Et même pour ceux qui ont le choix, cette liberté est parfois lourde à assumer.
Ainsi, l’orientation peut être vécue comme une épreuve pour les jeunes et pour les familles. Si elle est présentée comme une recherche de sa « voie intérieure », elle est souvent contrariée : par les projections des parents, les questions financières ou de mobilité, le manque d’information et de transparence, une sélection plus ou moins explicite, etc.
Dans le secondaire, l’orientation en France est aujourd’hui marquée par trois moments clés :
- la fin de la 3e : orientation entre les filières pro et générales,
- la fin de la 2nde : choix des spécialités (qui vont remplacer dans la filière générale les sections S, ES, L) ;
- la terminale avec le choix du supérieur.
Ces rendez-vous apparaissent souvent comme des « couperets » où l’on joue sa vie sur une décision plus ou moins réfléchie, plus ou moins éclairée, sur un « coup de dé » ; l’orientation n’est alors pas vraiment vécue comme un parcours progressif de réflexion personnelle et de découverte de soi et du monde professionnel.
D’ailleurs, 1 jeune sur 2 considère qu’il n’a pas été bien accompagné par son établissement s’agissant de l’orientation et de plus en plus de familles ont recours à des « coachs », psychologues… pour conseiller leur enfant. En parallèle, des applications numériques se multiplient pour rendre accessible au plus grand nombre des « appuis », tests, conseils… en matière d’orientation.
Avant les étapes d’orientation « classique », se pose aussi la question de l’orientation précoce dans des sections spécialisées pour des jeunes avec des difficultés (ULIS, SEGPA…) d’enfants issus de milieux défavorisés : on note par exemple que 75% des collégiens inscrits en SEGPA sont issues des 30% des familles les moins aisées.
Cette incapacité à préparer l’avenir des jeunes illustre une incapacité plus large de notre éducation à sortir du « présent permanent ». Le « culte de l’instant » les prive autant de leurs racines que de leurs rêves. Quelle place accordons-nous aux inspirations profondes des jeunes ? à leur soif d’absolu ? à leur envie de transformer le monde ? Qui sont les adultes qui poussent les jeunes à voir plus loin que leur souci immédiat ? à prendre la route pour quitter leur quartier ? Cette absence d’horizon est l’une des plus grandes injustices faites à de nombreux jeunes qui vivent au ras du bitume, coupé du rythme des saisons ou d’une ouverture à la culture. Quand on est enclavés, géographiquement ou mentalement, les jours finissent par tous se ressembler. Sans grandeur. Sans beauté. Inviter les jeunes à rêver, à transformer leur rêve en ambition, puis en objectif, c’est les aider à avancer. A quitter leur confort. A se dépasser. A contourner les obstacles. Ils n’arriveront pas toujours à atteindre leur rêve du départ. Ils devront composer avec le réel. Ils devront s’ajuster. Apprendre la déception et parfois, aller encore plus loin que ce qu’ils avaient imaginé. Dans tous les cas, ils auront progressé.
Notre rapport visera à favoriser une meilleure éducation à l’orientation tout au long de la scolarité, avec une attention particulière pour les jeunes qui ont aujourd’hui le sentiment de subir plutôt que de choisir.
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Date limite de réponse à l’appel à contribution : 28/02/2019
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