Aujourd’hui 17% des bébés naissent avec un trouble du neurodéveloppement (TND), soit 124 000 naissances par an, et presque 2% avec un trouble du spectre de l’autisme (TSA). Ce sont des handicaps invisibles comme 80% des handicaps. 

Impossible de les repérer in utero ou à la naissance. Ils vont se manifester plus ou moins sévèrement dans l’enfance, voire la (toute) petite enfance, pour peu qu’on sache les repérer, ou plus tard, à l’adolescence.

Troubles ? De quoi parle-t-on ?

Troubles neuro développementaux veut dire que l’atteinte se situe au niveau du système nerveux dès la phase de conception, causant une perturbation du développement cognitif et sensoriel de l’enfant qui entraîne un retentissement important sur le fonctionnement adaptatif scolaire, social et familial.

Ils regroupent les troubles du développement de la communication et des interactions sociales (autisme / TSA), du développement intellectuel (déficience intellectuelle ou retard mental), du développement de l’attention (trouble déficitaire de l’attention avec ou sans hyperactivité ou impulsivité TDA/H/I) et des fonctions associées (mémoire de travail, contrôle exécutif…) mais aussi les  troubles d’acquisition du langage ou des coordinations (dysphasies et dyspraxies) et les troubles spécifiques des apprentissages scolaires (par exemple la dyslexie-dysorthographie).

Une période propice à l’accompagnement précoce

Les premières années de vie sont essentielles pour le langage, la mémoire, la relation aux autres, la gestion des émotions… Elles posent aussi les fondations nécessaires aux futurs apprentissages scolaires (raisonnement, abstraction…). Or l’apport des neurosciences le prouve : plus on intervient tôt et de façon adaptée, plus on pourra infléchir positivement les trajectoires du développement puis du parcours scolaire, et donc la qualité de vie de ces enfants. Leur offrir la possibilité d’un accompagnement précoce adapté est un enjeu de société et de santé publique. 

Or, les professionnels de la petite enfance ne sont pas (ou très peu) formés aux TND. Il n’existe pas de module dédié et obligatoire dans la liste des référentiels et compétences à acquérir dans le certificat d’aptitudes professionnelles Accompagnant éducatif petite enfance (CAP AEPE) – formation privilégiée pour travailler auprès des jeunes enfants. Parfois, quelques heures de cours y sont consacrées. Pourtant, les professionnels accueillent immanquablement des enfants aux signes évidents sans savoir les qualifier, ni comment en parler aux parents.

Un accès moindre à l’accueil individuel

Parmi les enfants de moins de 3 ans éligibles à l’AEEH (Allocation d’éducation de l’enfant handicapé), 78% sont gardés à titre principal par au moins un des parents (la mère dans la grande majorité des cas), par choix ou faute de mode de garde adapté ; 30% le sont de façon exclusive (contre respectivement 56% et 34% des autres enfants). Cette forte implication parentale s’étend sur des périodes plus longues, éloignant significativement de l’emploi les mères.
Concernant les modes d’accueil formels payants, l’accès aux établissements d’accueil du jeune enfant (EAJE) est similaire pour les enfants bénéficiaires de l’AEEH (allocation d’éducation de l’enfant handicapé) et les autres (27% et 25% respectivement).

Cependant, l’accueil individuel chez une assistante maternelle est moins fréquent pour les bénéficiaires de l’AEEH (16% contre 29%). Le temps d’accueil est généralement plus court pour les enfants handicapés quel que soit le mode auxquels ils ont accès. Le recours aux auxiliaires parentales pour au domicile des parents dans le cadre du handicap n’est pas référencé ni chiffré.

L’entrée à l’école, retour à la case départ ?

Comme tout enfant, l’enfant autiste ou avec présomption de handicap, quelles que soient ses difficultés, a droit à une scolarisation. Pourtant, chez des enfants bénéficiaires de l’AEEH à 3 ans, elle est moins fréquente (78% contre 98%).

Entre 4 et 5 ans, ils passent en moyenne moins de temps à l’école que la durée d’enseignement hebdomadaire. Les enfants autistes, moins que les autres, bénéficient de temps plein de scolarité (12 heures hebdomadaires en moyenne, mais certains ne sont scolarisés que quelques heures). 

À l’entrée en école maternelle, si l’enfant a été repéré tôt, il peut se préparer à cette adaptation et bénéficier d’un soutien, notamment par la présence d’un accompagnant (AESH). Les familles auront dû, au préalable, valider plusieurs étapes d’un parcours administratif complexe[1].

Pour autant, un nombre important d’enfant porteurs de troubles arrivent à l’école sans diagnostic formel. L’équipe pédagogique va alors découvrir et observer son écart de développement et son comportement inhabituel. S’ils ont été formés (formation encore trop rare ou trop succincte), ils vont pouvoir considérer les signes en équipe et en parler aux parents.

A la maternelle, un environnement à adapter

L’environnement proposé à l’école maternelle est souvent inadapté aux enfants présentant des TSA. C’est particulièrement le cas au niveau sensoriel : bruit, lumière, mouvements, manque d’espace pour s’isoler des stimulis quand ils deviennent trop envahissants.

Les enfants autistes sont généralement anxieux et manquent de flexibilité. Ils ont besoin de cadre, de répétition, de rituels, de routines, de régularité, de repères. Cela les rassure. Emplois du temps visuels, chaînages d’activités, signalétique, sont autant d’outils qui vont les aider à mettre de l’ordre, donner du sens, se repérer dans le temps et dans l’espace. Ces mêmes enfants ont souvent des retards de langage ce qui complique la socialisation avec leurs camarades. D’autres aspects de cette vie collective sont également source de difficultés : rester dans un espace de regroupement, donner la main, participer à des activités collectives, comprendre les Ces mêmes enfants ont souvent des retards de langage ce qui complique la socialisation avec leurs camarades. D’autres aspects de cette vie collective sont également source de difficultés : rester dans un espace de regroupement, donner la main, participer à des activités collectives, comprendre les règles implicites des jeux de cour de récréation. Pour être plus hospitalière, l’école va parfois devoir mettre en place des outils spécifiques et visuels, de communication alternative.

Que propose IKIGAÏ ?

L’association IKIGAÏ propose des formations pour les professionnels de la petite enfance (auxiliaires parentales, assistantes maternelles, personnels des EAJE) afin de les outiller à l’observation, le repérage et l’accueil des enfants qui présentent des signes d’alerte de TND et plus particulièrement de TSA. IKIGAÏ organise des journées de formation dans les EAJE d’Ile -de-France, des visioconférences thématiques ouvertes aux professionnels et aux parents, mais aussi des ateliers d’accompagnement pour les parents qui élèvent un enfant “extra-ordinaire”.

Ce dispositif vise à former ensemble un maximum de professionnels de la petite enfance, de l’accueil collectif et individuel, pour que les enfants qui présentent des écarts de développement soient repérés dès le plus jeune âge et bénéficient de l’accompagnement dont ils ont besoin auprès des professionnels du soin, de l’éducation et de leur famille. Avec l’objectif d’aider ces enfants de rejoindre l’école maternelle dans de meilleures conditions, mieux préparés à cette échéance cruciale pour leur avenir.

“J’aimerais, quand je reprendrai le travail, trouver une professionnelle comme vous, pas une spécialiste mais une personne capable de comprendre ce que je vis, mes attentes et les besoins de mon enfant, avec laquelle je vais pouvoir collaborer en sécurité. Merci et bravo Mesdames d’avoir choisi de vous former !”

Une maman à une formation sur la préparation à l’entrée en maternelle

Au programme des formations pour les professionnelles de la petite enfance : observer l’enfant pour identifier et répondre à ses besoins, repérer les premiers signes de troubles, adapter son accueil à l’enfant avec TND/TSA, prendre soin de lui en tenant compte de ses particularités sensorielles, jouer et communiquer avec lui, le préparer aux attendus de la petite section de maternelle avec des activités favorisant la structuration, l’autonomie, la vie en collectivité, comprendre et communiquer avec les parents…

Grâce au soutien de mécènes et d’acteurs publics, ce dispositif est gratuit en 2024, dans la limite des places disponibles.

Tout savoir sur Les Petits Liens de l’Inclusion : https://www.association-ikigai.org/presentation-generale

Contact : aurelie@association-ikigai.org

Par Aurélie Sigrand, co-fondatrice de l’association IKIGAÏ


[1] Voir à ce propos l’éclairage de VersLeHaut dans « Le deuxième souffle de l’école inclusive » :  https://www.verslehaut.org/publications/articles/decryptage-le-deuxieme-souffle-de-lecole-inclusive/