Zoom sur « Passe Décisive », un accompagnement signé Sport dans la ville
Remobiliser par le sport pour permettre un retour en formation ou accéder à l’emploi : c’est la promesse du programme d’accompagnement « Passe Décisive » que porte Sport dans la Ville (SDLV).
Cette promesse pleine d’espoir qui engage le temps long n’est pas veine dès lors qu’elle porte déjà à notre regard quelques-uns de ses fruits. En témoignent ces 750 jeunes accompagnés seulement pour l’année 2022. Alors VersLeHaut (VLH) a enfilé ses baskets et s’est rendu sur les terrains de SDLV pour comprendre le programme et son impact sur les jeunes.
Première étape, l’échauffement : les clefs de compréhension d’une méthodologie bien ficelée
Cet échauffement consiste en deux heures de formation, version accélérée, avec la directrice du programme, Nadine Sadoudi, pour nous donner les clefs de compréhension de la pédagogie et de la méthodologie !
Ce programme d’accompagnement n’est peut-être pas encore à maturité (il est l’un des plus jeunes projets que mène SDLV) mais sa méthodologie a de quoi faire pâlir. En se basant sur un référentiel de compétences, les Référents Insertion Spécialisée (RIS) orchestrent les trois pôles qui le constituent : l’accompagnement social, l’affinage du projet professionnel, et le développement de compétences (savoir-être et savoir-faire).
De manière plus concrète il s’agit d’ateliers thématiques allant du numérique à la mobilité, ou d’ateliers d’élaboration du projet professionnel aux ateliers de sociosport. Les jeunes sont ainsi embarqués pour un accompagnement variable en fonction de leurs besoins et pouvant aller jusqu’à 12 mois de parcours.
L’alliance de ces trois pôles permet un accompagnement global des jeunes. En développant leurs compétences et en étant régulier dans leur participation, les jeunes apparaissent plus enclins à accepter l’aide du RIS. Cela les amène plus naturellement à prendre de la hauteur sur leur parcours, à se présenter aux entretiens individuels, et à mieux se connaitre pour finalement cerner ce qu’ils veulent devenir.
Ce programme ne se limite donc pas à la pratique sportive, cette dernière en est le cœur. Elle est grandement utilisée comme un outil pour capter le jeune et lui offrir un cadre bienveillant et structuré. Il arrive que le RIS ou l’éducateur sportif torde la pratique sportive pour recueillir des comportements chez les jeunes et pouvoir en discuter. Cela dépend de la compétence qui est travaillée qui elle-même dépend des besoins du groupe.
En leur offrant un petit groupe dans lequel ils peuvent s’exprimer, ce programme leur offre aussi l’opportunité de prendre le temps de se connaitre, de connaitre l’autre, et de cheminer progressivement vers son insertion professionnelle.
Deuxième étape, la séance sportive éducative : à la rencontre d’une pratique sportive adaptée
Le cœur de la séance sportive éducative prenait place à la salle de sport de Sarcelles avec l’éducateur sportif, Fily Doumbia, le RIS, Alfa Drame, et les jeunes : deux heures de « renfo » (entrainement de renforcement musculaire) et de « cardio » (entrainement basé sur le rythme cardiaque à l’effort) pour finalement souffler et discuter de ce que les jeunes ont ressenti.
Circuit de course à pied sur tapis pour faire monter le rythme cardiaque, circuit de renforcement de la ceinture abdominale, circuit de renforcement dynamique modérée, circuit de renforcement dynamique du bas du corps, circuit… d’échanges et de debrief sur la séance et son ressenti !
En lisant, il est possible de se demander pourquoi nous parlons de séance de sport éducative si elle ressemble (presque) en tous points à une séance de « muscu à la salle » traditionnelle.
Mais la nuance existe évidemment. Elle agit de manière informelle et c’est ce qui en fait sa richesse. Finalement, la particularité des séances apparait par différents moyens. D’abord, le vocabulaire que le RIS et l’éducateur sportif choisissent. Durant la séance, il n’est pas rare d’entendre l’éducateur sportif nous dire de ne pas lâcher, de nous dépasser, mais aussi de nous écouter, de connaitre nos vraies limites de nos fausses. Il nous encourage, nous motive et nous donne confiance en nous.
La particularité c’est aussi le fait de prendre le temps de s’applaudir, de rigoler, d’échanger, de rechigner (un peu) et de reprendre. Cette complicité qui nait entre les jeunes ainsi que la relation de confiance qui s’instaure avec l’éducateur sportif poussent à s’investir davantage. Le jeune se libère et accepte de sortir des sentiers battus pour aller plus loin.
Tous ces détails semblent anodins et pourtant ce sont eux qui font que les jeunes évoluent : ils gardent le sourire, ils sont fiers d’eux et du collectif, et ils parlent plus facilement lors du temps du debrief. Le RIS profite d’ailleurs de ce moment pour commencer à questionner les jeunes en vue des ateliers de réflexivité.
La pratique sportive est adaptée au groupe et à ses besoins puisque son déroulé n’est pas toujours le même (au même titre que les ateliers de réflexivité varient en fonction de la compétence travaillée). C’est en cela que le programme n’est pas simplement le fait de mettre un ballon au milieu d’un terrain ou d’espérer que le jeune acceptera un rendez-vous à la mission locale !
Les étirements ? Jamais à chaud ! Comment les ateliers de réflexivité questionnent les jeunes ?
Une semaine plus tard, on s’est retrouvé avec la même équipe pour l’atelier de réflexivité. Son premier objectif ? Donner la parole aux jeunes. En effet, même si les objectifs en termes de compétences diffèrent en fonction du groupe, permettre et valoriser leur parole reste un objectif pivot. C’est grâce à ce dernier qu’ils s’ouvrent progressivement et « jouent le jeu ».
Ainsi, les séances sportives nourrissent ces ateliers puisqu’ils donnent matière à l’éducateur et aux jeunes sur des situations vécues dans un cadre sportif mais où les réactions et émotions peuvent se vivre dans un cadre personnel et/ou professionnel. Elles vont donc plus loin que simplement remettre le jeune en mouvement, elles se font véritable outil et alliées de l’éducateur pour que le jeune construise son parcours professionnel.
L’atelier démarre avec un débat mouvant (cela consiste à prendre physiquement position, pour ou contre, une proposition émise en se positionnant dans l’espace). Il permet d’emmener les jeunes à réagir, interagir, contredire et réfléchir. Il permet aussi à l’éducateur de les faire se questionner les uns les autres et de mieux les connaitre.
Chaque atelier n’a pas toujours un débat mouvant. En revanche, chaque atelier mobilise un outil de mobilisation des acquis par la pratique sportive dont le jeu de la MAPS ! Se faisant outil et jeu en même temps, le jeu de la MAPS invite les jeunes à réfléchir sur qui ils sont et ce qu’ils veulent. Un jeu de l’oie où chaque case est pensée sans perdre de vue l’objectif final du programme : permettre l’insertion socioprofessionnelle des jeunes ; et pour y parvenir, le jeu s’appuie sur des objectifs intermédiaires.
Entre défis qui semblent insurmontables ou questionner pourquoi je peux être quelqu’un de reconnaissant, le jeune se positionne et sort de sa zone de confort. Il apprend à mettre en mots ses pensées par le fait d’argumenter une affirmation. Il apprend à s’appuyer sur les autres autour en les voyant comme des alliés plutôt que des adversaires.
Au bilan, VersLeHaut repart avec de nombreuses courbatures et la découverte immersive d’un bout de ce programme, mais pas que. Elle a pu être témoin d’échanges complices entre éducateurs et jeunes. Elle a observé des jeunes qui acceptent de jouer le jeu avec sincérité. VersLeHaut est ravie d’avoir pu participer sans perturber la dynamique collective et l’aisance des jeunes. Au contraire, ils ont défendu leurs idées, ont écouté les avis d’autrui, ont participé activement à la séance de sport comme à l’atelier.
Toute l’équipe de VersLeHaut souhaite remercier l’équipe de Sport dans la ville, et plus spécifiquement l’équipe du programme « Passe Décisive » pour son accueil et son enthousiasme à permettre cette expérience immersive.